Critique de Johann Gasnereau –

Former toute une équipe, très complète, pour mettre en œuvre ce « musical » : metteur en scène chorégraphe, directeur musical, directrice vocal, coiffeurs-maquilleurs, créateur de costumes, décorateur, créateur de lumières… Beaucoup de monde pour monter ce spectacle qui n’a rien à voir avec les comédies musicales américaines puisqu’il n’y pas de texte.

Une histoire tout de même !

Au royaume d’Eris, Cassandre et Jason sont passionnés, enflammés, rouge baiser ! Alceste est un rêveur candide, un bleu comme on dit. Daphné, elle, voit la vie en rose…
Par quel malheureux hasard s’égarent-ils dans le Royaume d’Eris, la sorcière au coeur noir ? Déesse de la Discorde, elle règne sur un monde austère, entourée de ses légions, mi-anges, mi-démons. Passion, couleur, lumière… sur ses terres ! C’est plus qu’il n’en faut pour la mettre en colère ! A l’aide de ses deux plus grands corrupteurs, l’ensorcelante Circé et le troublant Narcisse, Eris propage, avec foudre, sa malédiction ! A défaut de romance, ses quatre victimes découvriront frustration, amertume, rivalité et jalousie…

Oui, bon, vous l’aurez compris, il ne faut pas venir voir ce spectacle pour l’intrigue. De ce côté-là, il n’y a pas grand-chose à dire. C’est très secondaire.

Le tout en chansons

Le spectacle n’est constitué que d’une accumulation de chansons tirées de notre répertoire français, (sauf une : Bad de Michael Jackson). C’est un pot pourri enlevé, les mélodies, les chansons sont toutes revisitées, de façon judicieuse, originale. Cela va à 100 à l’heure. Ce musical, je l’ai ressenti, vécu même, comme une espèce de grand quiz où, il faut deviner les titres, reconnaître les mélodies. (On passe de Piaf à Lara Fabian, en passant par les Rita Mitsouko, Lorie…Pour vous dire que c’est vaste et varié). Je ne suis pas forcément un fan de variétés françaises mais cela fonctionne. Les partitions, la musique sont adaptées, revisitées de manière enlevée et inattendue. Les voix des chanteurs sont à saluer, il s’agit de performance, ils enchaînent sans relâche. Leurs voix s’harmonisent parfaitement, les chorégraphies sont millimétrées, le pianiste (et également arrangeur) est excellent. Oui, ils sont tous au point. Même si vous préférez le chant lyrique, le second degré apporte une vraie touche humoristique au tout, ce qui rend le spectacle regardable et supportable.

Par contre, je pense qu’on est très loin des créations comme « Panique à Bord », comédie musicale déjantée, aux répliques et chansons savoureuses, spectacle également joué, il y a deux ans, au Vingtième Théâtre.

Ici, la direction artistique, précisément les décors et les costumes, sont particulièrement laids et font appels et de façon immédiate, à ce que nous avons tous dans notre imaginaire collectif : Tim Burton, lui-même très inspiré par d’autres d’ailleurs…Cela se veut Gothique et baroque. Nous avons la sorcière de chez Disney, un Edward aux mains d’argent et un faux Tintin aussi. Imaginez le tableau.

Ces choix me semblent incompréhensibles, mal justifiés, peu judicieux et en décalage complet avec ce qui est donné à entendre. Il ne suffit pas d’aimer un univers pour effectuer une tel « placage ». C’est trop référencé, c’est encore pas assez « mûri ». Il faudrait revoir les exigences à la hausse.  Faire un pot pourri, un « patchwork », comme ils disent, oui, pourquoi pas, mais encore faudrait-il trouver un véritable sens, et aussi s’approprier des références plus judicieusement. Cela manque de subtilité. Il ne suffit pas de mélanger les ingrédients pour faire une bonne recette.

C’est dommage car cela donne un spectacle qui ressemble plus à une sortie pour comité d’entreprise. D’ailleurs, les fans étaient venus en bus, me semble-t-il, le soir de la première.

Bon, il est dit que c’est un spectacle populaire…

Coups de foudre
De : Gabrielle Laurens, Jean-Baptiste Arnal et Catherine Robert
Mise en scène : Jean-Baptiste Arnal
Avec : Célia Delaruelle, Angélique Fridblatt, Marlène Schaff, Rachel Pignot, Cécile Dumoutier, Gabrielle Laurens, Aurélia Arnaud, Lorelyne Foti, Malou Vigier, Yvonne Tondolo, Emmanuel Vacarisas, François Borand, Julien Salvia, Jean-Baptiste Arnal, Matthieu d’Aurey
Piano : Raphaël Callandreau ou Sébastien Ménard

Du 5 mai au 25 juillet 2010

Vingtième Théâtre
7 rue des Plâtrières, 75 020 Paris
www.vingtiemetheatre.com

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