Saaba © Tilo Stengel
ƒƒƒ article de Denis Sanglard
On ne reviendra pas ici sur Contemporary Dance, chorégraphié par Hofesh Shechter, chroniqué dans ce même Fauteuil il y a peu. Nonobstant dix minutes de moins sur la première version présentée au Théâtre des Abbesses et un espace plus étendu qui dilue quelque peu la force explosive de cette chorégraphie, rien d’autre à ajouter.
Saaba. Une danse sur la pointe des pieds, des corps de fait en extension, à la verticalité exacerbée, toujours, au mouvements déliés ou cassés, une danse concentrée à l’extrême, plus implosive qu’explosive. Qu’ils soient refermés sur eux-mêmes, comme d’étranges chrysalides, ou soudain ouverts pour un envol toujours retenu, les corps sont en tension qui jamais ne se relâche, entre écartèlement plus que grand écart et fermeture tenue. C’est un étrange sabbat, oui. Il y a, là, de la danse de sioux et, ici, plus loin, dans un long et lent défilé, danseuse après danseuse, de la danse traditionnelle thaïe, le Kohn. Du moins croit-on le percevoir, le deviner. Figures d’offrants aux mains ouvertes, étranges officiants pour une cérémonie religieuse, païenne, paillarde, on ne sait. Guetteurs, mains en visière, corps en avant, fixant obstinément l’horizon. Autant semble-t-il d’évocations de fresques, babylonienne, égyptienne, imaginaire plus sûrement, où le corps répond à une géométrie angulaire précise, sculptant dans un même ensemble le groupe auquel il est intégré et l’espace dans lequel il évolue. Le mouvement est expressif, oui, mais demeure le mystère de ses étranges invocations qui se succèdent et métamorphosent le corps, menace cette verticalité obligée, têtue et fragile. Il y a un étrange chiasme entre ces corps sensuels, on peut le dire, et une sécheresse volontaire dans le mouvement, le plus souvent cassant, brutal même, comme soudain échappé d’avoir trop longtemps été retenu, contraint… Parfois le mouvement n’est que respiration, poitrine qui se soulève avec grande amplitude et c’est tout, c’est ténu et c’est immense. Sharon Eyal privilégie en premier lieu l’énergie du groupe. Lequel est compact, masse organique, un seul corps, bougeant tout en fluidité comme un banc de poisson où parfois se détache, s’échappe pour un court instant, un solo, une figure qui ne tarde pas à réintégrer l’ensemble comme pour y puiser à la source sa vitalité. Saaba est d’une étrange beauté épurée et d’une force tranquille sans pareille.
Saaba © Tilo Stengel
Contemporary Dance, chorégraphie et musique de Hofesh Shechter
Interprétation : Jesse Bechard, Tsung-Hsien Chen, Sabine Groenendijk, Hiroki Ichinose, Janine Koertge, Valeria Kuzmica, Micol Mantini, Rachel McNamee, Einar Nikkerud, Riley O’Flynn, Endre Schumicky, Frida Dam Seidel, Lee-Yuan Tu, Joseba Yerro Izaguirre, Amanda Åkesson
Conception des décors : Mylla Ek
Création des costumes : Osnat Kelner, Hofesh Shechter
Création lumières : Tom Visser
Assistants à la chorégraphie : Bruno Guillore, Chris Evan, Attila Ronai
Saaba : chorégraphie de Sharon Eyal
Co-création : Gai Behar
Interprétation : Benjamin Behrends, Miguel Duarte, Hiroki Ichinose, Janine Koertge, Valeria Kuzmica, Rachel McNamee, Riley O’Flynn, Christoph von Riedemann, Duncan C Schultz, Endre Schumicky, Frida Dam Seidel, Joseba Yerro Izaguirre, Amanda Åkesson
Assistante chorégraphe : Rebecca Hytting
Création des costumes : Maria Grazia Chiuri pour la Maison Dior
Compositeur : Ori Lichtik
Musique enregistrée Hold you down de Daniel Stanfill, Nate Mercereau et Michael Milosh (Rhye), Hayaty de Mohammed Abdel Wahab, Chant et Sanza de Jean Nkoulou et Homere Zambo (Patrice et Leontine Mboumba), From the and 15 de Avaq, Station to Station de Erin Elisabeth Birgy (Mega bog)
Création lumières : Alon Cohen
Du 4 au 7 mai 2022
Du mercredi au vendredi à 20 h, samedi à 19 h
Grande Halle de la Villette
211 avenue Jean Jaurès
75019 Paris
Réservations 01 40 03 75 75
www.lavillette.com
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