ƒƒƒ article de Camille Hazard
Mais qui est Cernodrinski ?
L’auteur Macédonien Goran Stefanovski, structure sa pièce Cernodrinski revient à la maison sous forme de gevrek, ce petit pain rond troué au milieu, frère du bägel ; Le personnage de Cernodrinski est cette partie manquante autour de laquelle, gravitent une armada de personnages, une ribambelle d’histoires.
Vojdan Cernodrinski, qui fut l’un des plus importants dramaturges et homme de théâtre macédonien du début du XXème siècle, est représenté dans cette pièce, par l’esprit qui l’entoure, par des histoires, des rumeurs qui, transformées, propagées, amplifiées, finissent par devenir folklores et légendes. L’homme de théâtre est mort en 1951 mais le pays a fait sien son nom comme un étendard, chacun écoutant et croyant ce qui l’arrange…
« Le rythme est une Odyssée, qui s’échafaude sur le cycle, sur le mythe de l’éternel retour. Une traversée au long de la frontière, sur le Drin noir (Cerno), l’une des principales voies de navigation des Balkans. » *
Le metteur en scène Dominique Dolmieu, et les neufs comédiens de la distribution, parviennent à établir une relation avec le public tout à fait surprenante et magnifique. Dans un espace plutôt réduit, les comédiens vivent à quelques centimètres des spectateurs, installés de manière bi frontale. Notre proximité avec leur corps, leur voix, les situations poussées à l’extrême grâce à un engagement total des comédiens, nous immergent dans une épopée de la vie. A travers quatorze tableaux-histoires et une quarantaine de personnages, nous traversons des villages, des mariages, des bunkers, Paris, une foire, des auberges… On y rencontre des damnés, des fous, des cruels, des naïves, des clowns, des amoureuses, des employés des services secrets, des révolutionnaires… enfin toute une galerie d’archétypes de sensibilités et de comportements humains. Pour mettre en scène cette profusion de vie, Dominique Dolmieu n’a besoin de rien ; pas de décor, à peine quelques accessoires, pas de costumes imposants, juste quelques signes vestimentaires, pas d’effets techniques vrombissants, un soupçon d’éclairage réfléchit pour les ambiances et les textures, quelques rumeurs sonores au loin pour creuser l’espace, lui donner du volume… Dominique Dolmieu retire tout et ne garde que le théâtre. D’ailleurs le texte de Goran Stefanovski joue perpétuellement avec la frontière entre la réalité, les rêves et le jeu. On est pris dans un tourbillon de vérité réaliste et d’échappée fantastique où TOUT peut advenir.
« Le matériau est humain, charnel, magnétique. Les sirènes comme moteur. C’est en partance, ça cherche des issues. La sensation du danger permanent – sur le qui-vive. L’étrange qui rôde (…). » *
On explore l’âme humaine tout en découvrant un texte qui questionne le théâtre et les traces de vie que chacun laisse comme une empreinte.
Héritage du théâtre pauvre de Grotowski, qui ne peut laisser indifférent, par sa vérité criante, par sa beauté du geste nu.
Héritage du théâtre brut de Peter Brook, un théâtre à l’état brut, « le sol, la sueur, le bruit, l’odeur ». Peu importe le quand ?, Comment ? : ICI ON JOUE.
* propos de Dominique Dolmieu avec la collaboration de Daniel Lemahieu.
Černodrinski revient à la maison
De Goran Stefanosvski
Traduction du macédonien Maria béjanovska
Mise en scène Dominique Dolmieu
Assistante mise en scène Céline Barcq
Dramaturgie Daniel Lamahieu
Régie Antoine Michaud
Avec Céline Barcq, Alain Carbonnel, Géry Clappier, Fabrice Clément, Franck Lacroix, Tristan Le Doze, Barnabé Perrotey, salomé Richez, Clara SchwartzenbergLe texte est publié aux Éditions l’Espace d’un instant.
Du 9 au 20 juin 2015
Du mardi au samedi à 20h30Maison d’Europe et d’Orient
3, passage Hennel – 75012 Paris
M° Gare de Lyon, Reuilly-Diderot
Réservation 01 40 24 00 55
www.sildav.org
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