ƒƒƒ article de Victoria Fourel

© Bigre / crédit illustration : Stéphane Trapier

Le spectacle Bigre se décrit lui-même comme un mélo burlesque. Alors il prend quelques codes du clown et du muet, et il les injecte dans un décor ultra-réaliste – ou presque. Dans des chambres de bonnes collées les unes aux autres, trois personnages partagent un palier et des instants de vie, au rythme des petits ratés et des grands imprévus. Et on rit, beaucoup, des sales coups et des hasards, dans un décor où les vies sont imbriquées.

Ce mélo est sans paroles. Cette contrainte évidente de jeu et de compréhension se transforme en atout tant les autres appuis sont riches. Ces locataires sous les toits écoutent la radio (trop fort), vont aux toilettes (communes), bronzent (sur le toit), subissent les travaux dans l’immeuble. On suit tout ça d’un œil amusé, et on se laisse surprendre sans cesse par les prouesses de régie, et d’écriture du plateau. En termes de lumières, de timing, et d’idées, tout est là, pour sortir du réel et entrer dans la folie douce. Le vent fait s’envoler les poubelles, les poissons rouges sont intoxiqués, les prises de sang sont des scènes catastrophes. Techniquement, c’est très fort, notamment grâce à la présence d’hommes de l’ombre qui font voler les vêtements et les décors, et à des scènes très  ‘’clipesques’’, en musique, qui retracent les ellipses de la vie de palier.

Et cette intelligence de la scène est au service d’un sujet banal, mais qui flirte avec l’universel. Se croiser et se confronter, les petites choses qui font de nous des ratés, et les petits accrochages que l’on voit comme des grands drames. Et qui en sont parfois. Le comique de répétition des événements, les attachements et les détachements, le poisson rouge et la technologie, tout prête à rire, et à s’émouvoir. Pour exemple, un vide-ordure peut à la fois faire glousser, puis devenir intensément poétique.

Entre tableaux, récit et portraits, ce spectacle doux-amer aux belles images superpose la vie et l’absurde, le bête, le méchant et le poétique. Et offre un moment accessible et intelligent, de clown et de cinéma.

Bigre – Mélo Burlesque
De Pierre Guillois
Mise en scène Pierre Guillois
Avec Pierre Guillois, Agathe L’huillier et Olivier Martin-Salvan

Du mercredi 16 décembre 2015 au dimanche 17 janvier 2016.
Du mardi au dimanche à 20h30. Relâche le 25 décembre et le 1^er janvier.

Théâtre du Rond-Point
2bis av. Franklin Roosevelt 75008 Paris
Métro Franklin D . Roosevelt ou Champs-Elysées Clémenceau.
Réservation 01 44 95 98 21
www.theatredurondpoint.fr

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