Article de Camille Scordia

© Patrick Berger

L’archipel de Marie NDiaye est un montage d’extraits de romans, de pièces de théâtre et d’interviews de l’écrivain, où défilent plusieurs incarnations des personnages qui habitent ses romans et d’elle-même. Imprégné des thématiques qui parcourent l’oeuvre de l’auteure, le spectacle entraîne vers de nombreux horizons d’interprétation : la question des origines, l’acceptation de l’autre et de la différence dans la société, le poids de la famille convergent dans les différentes scènes qui font l’objet d’un montage. Au-delà de ce leitmotiv, ce montage développe une réflexion sur le travail de l’écrivain, ses questionnements et la rigueur de l’exercice.

Avec une troupe de dix comédiens, le spectacle met en scène une galerie de personnages variés, sans que l’on puisse véritablement attacher un caractère à l’un ou l’autre, et ce en raison de la forme du spectacle. Il s’agit d’un montage, c’est-à-dire d’un patchwork mêlant différents tissus, matériaux, qu’il s’agisse de romans, de pièces de théâtre ou d’interviews. C’est donc une forme assez disparate qui est présentée au public et, par conséquent sans véritable intention dramaturgique.

Des scènes sont chantées, dansées, d’autres simplement lues, si bien que le spectateur est souvent surpris, ses attentes constamment déjouées. C’est là un des rares avantages que présente cette forme. Car, malgré une bonne interprétation générale de la part des comédiens, il est bien difficile de maintenir un bon niveau d’attention tout au long du spectacle, principalement de par son défaut d’unité. Il paraît quasiment impossible de trouver le moindre fil conducteur dans ce spectacle : quel est le propos ? Certes, les thématiques qui hantent l’œuvre de Marie NDiaye sont soulevées, mais le lien entre elles, et le lien avec le public, est bien difficile à percevoir.

Il serait hors de propos de vouloir comparer un montage d’extraits à une véritable pièce de théâtre, dotée d’un début et d’une fin, mais le biopic en théâtre semble un genre plus difficile à réaliser qu’au cinéma. Dans The Hours, par exemple, le portrait de Virginia Woolf apparaissait, en creux, au travers d’histoires reprises de ses romans, mais également de sa propre vie. Elles se trouvaient unifiées grâce aux multiples possibilités de montage qu’offre le médium du cinéma. Sur les planches du théâtre, il est bien plus périlleux de s’aventurer sur ces terres, et l’addition d’extraits de romans, l’agrégation de matériaux, de formes et de registres différents se traduit par un éparpillement du sens. Si les moments de lecture et extraits d’interviews de l’auteure laissent entendre la voix de la romancière, son style et son univers, les extraits de ses romans peinent à se trouver une place dans le propos.

Archipel Marie NDiaye souligne les défis d’un genre au théâtre : celui du portrait littéraire, mais parvient néanmoins à donner l’envie de parcourir les histoires de Marie NDiaye.

Archipel Marie NDiaye
Montage d’extraits de romans, de pièces de théâtre et d’interviews de Marie NDiaye
Adaptation et mise en scène Georges Lavaudant
Création lumières Georges Lavaudant
Chorégraphie Philippe Viet
Création son Philippe Gomes
Perruques Jocelyne Milazzo
Maquillage Sylvie Gailler
Régie générale Grégoire Boucheron
Avec Valérian Behar Bonnet, Elisa Benizio, Hugo Brunswick, Rosa Bursztein, Bérénice Coudy, Clovis Fouin, Kevin Garnichat, Benoit Hamon, Fannie Outeiro et Barbara Probst

Durée : 1h35
Du Mardi 26 au samedi 30 avril à 20H30

Théâtre des Bouffes du Nord
37 bis boulevard de la Chapelle – 75010 Paris
Réservation 01 46 07 34 50
www.bouffesdunord.com

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