À l'affiche, Critiques // A Invençao da Maldade, mise en scène par Marcelo Evelin, Centre national de la danse, Pantin

A Invençao da Maldade, mise en scène par Marcelo Evelin, Centre national de la danse, Pantin

Oct 18, 2019 | Commentaires fermés sur A Invençao da Maldade, mise en scène par Marcelo Evelin, Centre national de la danse, Pantin

 

 

© Maurício Pokemon

 

ƒƒƒ article de Ducrot Numina

Nous sommes accueillis en un silence cérémonial. Des hommes et des femmes sont dispersés dans les angles de la salle. Des corps nus, traversés de spasmes. Les pas se font petits, nous entrons comme des organismes étrangers, nous comprenons que quelque chose d’important se produit, quelque chose qui nous échappe encore. Les danseurs épousent le rythme du mouvement des cloches qui sont attachées au plafond. La lumière, intense, ne cache pas la nudité, elle met en valeur, accentue les angles. Chacun s’assied sagement contre les murs, de peur d’enfreindre une règle collectivement établie : ne pas toucher au foyer fait de bois qui jalonne la pièce.

Et soudain une musique apparaît. Les chairs se mettent à bouger plus frénétiquement cette fois, et se retrouvent comme happées vers l’une des niches. À ce moment nous devenons témoins d’une véritable bacchanale. Les danseurs sont pris de fortes pulsions mêlant danse et transe. Le regard du public d’abord crispé fini par s’apaiser.

Il s’agit en réalité d’une hétérotopie, celle-là même citée par Foucault. Le lieu représenté, amené par la danse, ne peut être défini, il saurait en contenir mille autres à la fois. Il n’existe pas, ou plutôt il existe sous toutes les formes possibles. Tous les imaginaires s’entremêlent, les mouvements si particuliers, le rythme et les aspects organiques (sueur qui gicle, corps rougis par des gestes à répétition) nous rappellent à chaque instant qu’il est créé et construit en direct.

Le corps devient autosuffisant par sa seule présence. Il n’est dicté et dirigé que par pulsions maladroites, l’intellect n’intervient à aucun moment. Tout devient plus pur et sincère. Cela nous renvoie à notre propre corps, à l’image sociétale à laquelle il est forcement rattaché. Il apparaît comme notre empreinte culturelle, notre tombeau. En assistant à cette représentation nous avons la chance d’observer au plus près et avec beaucoup de bienveillance, à l’effeuillage des codes sociaux dans lesquels les corps peuvent être enfermés. Les mouvements et les gestes apparaissent comme un nouveau langage visuel, pour le conscient fait de mots insaisissables et complètement limpides pour le sensoriel.

Le temps s’étire et se rétracte, les gestes se répètent, la musique également. Aucune indication temporelle n’est donnée. Les spectateurs se laissent envoûter, certains se surprennent à taper le rythme. Et puis l’harmonie, l’osmose prennent fin et les danseurs, en une procession finale nous laissent avec toute sorte de souvenirs et de sensations indescriptibles, impalpables.

 

© Maurício Pokemon

 

 

A Invençao da Maldade, mise en scène par Marcelo Evelin

Avec Matteo Bifulco, Elliot Dehaspe, Maja Grzeczka, Bruno Moreno, Marcio Nonato, Rosângela Sulidade, Sho Takiguchi

Conception et chorégraphie Marcelo Evelin

Dramaturgie Carolina Mendonça,

Son, Sho Takiguchi

Réalisation des cloches en céramique Yu Kanai

Recherche philosophique Jonas Schnor

Collaboration Christine Greiner, Loes Van der Pligt

Photographie et vidéo Mauricio Pokemon

 

 

Remerciements Amanda Pina

Spectacle créé le 5 avril 2019 au CAMPO arte contemporanea (Teresina)

 

 

Du 15 au 18 Octobre 2019

Centre National de la Danse

1 Rue Victor Hugo

93507 Pantin

 

Réservation 01 41 83 27 27

www.cnd.fr

 

 

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