À l'affiche, Critiques // 1793, on fermera les mansardes, on en fera des jardins suspendus ! Par la Troupe Ephémère, Théâtre Gérard Philipe de Saint Denis

1793, on fermera les mansardes, on en fera des jardins suspendus ! Par la Troupe Ephémère, Théâtre Gérard Philipe de Saint Denis

Avr 27, 2017 | Commentaires fermés sur 1793, on fermera les mansardes, on en fera des jardins suspendus ! Par la Troupe Ephémère, Théâtre Gérard Philipe de Saint Denis

ƒƒƒ article de Denis Sanglard

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© Anne Sendik

Il fallait être sacrément culotté pour reprendre 1793 (« 1793, la cité révolutionnaire est de ce monde ») créé en 1972 par le Théâtre du Soleil. Complétement fou et audacieux avec raison de monter cela avec des adolescents de Saint Denis… Les plus de 6 minutes de standing-ovation le jour de la première ont démontré que ce soir-là non seulement le pari était réussi mais allait bien au-delà. Une vraie leçon de citoyenneté, de théâtre populaire et d’engagement. 20 ados vous empoignaient la révolution à bras-le-corps avec une intelligence, une énergie inouïe et bouleversaient une salle bouche-bée. La révolution était sur le plateau, en marche, au galop même, ces vingt-là embrasaient le théâtre et faisaient éclater les mots de 1789, les fondements de la république avec une acuité insensée. Sur ce vaste escalier qui grimpait jusqu’aux cintres, ces adolescents d’aujourd’hui, adultes demain, prenaient la parole, s’’emparaient d’un discours qu’ils faisaient leurs, parce que toujours d’actualité et parce qu’il est aussi et tout simplement le leur. Superbe pied-de-nez aux réactionnaires de tous poils dont les discours bellicistes, hargneux et outranciers à propos des banlieues étaient ici battus en brèche. Une création en réponse cinglante aux préjugés. Quelques soient leur origine, leur peau, leur accent, leur handicap, ces ados exprimaient les fondements de la république dont ils sont les enfants et pas peu fiers d’en être. Et ce qui frappaient c’était bien ça, cette intelligence du texte qu’ils s’appropriaient de façon épatante, éclatante, comme une évidence, parce qu’ils savent de quoi ils parlent, et dans l’urgence d’une veille des élections présidentielles. Liberté, égalité, fraternité, cette devise républicaine prenait ce soir-là une résonnance particulière que nous aurions aimé entendre aussi de la part de nos politiques en lice. Rien ne leur échappait des nuances d’un texte parfois ardu dont ils se jouaient avec un bonheur évident, un talent affirmé. Droits de l’homme ou discours de Robespierre, discussions de sections, conversations de lavandières, la salle entendait soudain des mots qui vous giflaient de leur vérité et de leur actualité toujours brûlante. Et quand La Marseillaise fut chantée, quelques mesures, sans être cocardier, la salle retint son souffle. Comme elle fut saisit par cette chanson, Somewhere Over the Rainbow, devenu chant d’espoir, en attendant que les mansardes deviennent des jardins suspendus…Jean Bellorini, Delphine Bradier, Mathieu Coblentz, Gaëlle Hermant ont dirigé au cordeau, cette troupe éphémère, créée à l’initiative de Jean Bellorini à son arrivée au TGP. Une direction d’acteurs qui vous épate, une circulation fluide des corps, une légèreté dans la gravité et des trouvailles parfois très drôles (au détriment des pastèques). Une mise en scène simple, sans chichi ni tralala, dépouillée sans être austère, légère même sans jamais rien occulter de la gravité de ce qui est énoncé ou des situations. Avec au centre l’importance donnée à la parole qui circule avec une aisance confondante. Les ados de Saint-Denis, sans-culottes pour quelques soirs, ont offert là quelque chose d’infiniment précieux, de rare. S’emparant d’un texte emblématique, c’était aussi leur parole, leur espoir, leur révolution qu’ils affirmaient avec autant de talent que d’engagement. Merci à eux. On regrettait juste qu’il n’y eu que trois soirs pour les entendre…

1793, on fermera les mansardes, on en fera des jardins suspendus !
D’après 1793, la cité révolutionnaire est de ce monde, crée par Le Théâtre du Soleil (1972)
Direction artistique Jean Bellorini, Delphine Bradier, Mathieu Cobleznz, Gaëlle Hermant
Création sonore Sébastien Trouvé
Régie Lumière Richard Fischler
Régie Son François Sallé
Régie plateau Rachid Bahloul

Avec Shaur Ali, Eunice Assamoi, Ayat Ben Yacoub, Juliette Boisseau, Maera Chouaki, Victor Courcoux, Fatima Diallo, Samuel Dijoux, Ibrahim Djimet, Esther Engelberg, Syphax Hadjemi, Nathan Hérin, Sara Kadem, Jeanna Lahmar-Guinard, Léa Le Floch, Lisa Ndikita, Mamou Sacko, Maïa Seassau, Matisse Tchenquella, Ornella Touati

Du 20 au 22 avril 2017 jeudi et vendredi à 20h, samedi 15h et 20h

Théâtre Gérard Philipe
Centre Dramatique National de Saint-Denis
59 boulevard Jules Guesde – 93200 Saint Denis
Réservations 01 48 13 70 00
www.theatregerardphilipe.com

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