Critiques // Critique •« Prométhée enchaîné » nous met en scène au théâtre de l’Odéon Ateliers-Berthier

Critique •« Prométhée enchaîné » nous met en scène au théâtre de l’Odéon Ateliers-Berthier

Fév 17, 2012 | Aucun commentaire sur Critique •« Prométhée enchaîné » nous met en scène au théâtre de l’Odéon Ateliers-Berthier

Critique Dashiell Donello

Des habits de théâtre hantent la coulisse côté cour, où une loge espère son acteur. Le rideau est baissé et fredonne le brouhaha du public. La scène se languit d’action à venir, mais ne lui dites pas que « Prométhée enchaîné » est peu enclin à l’intrigue, et à l’action. C’est, comme dit Aristote, un drame simple. Tout vient du poète et de la concordance du temps, de la parole et de la chair. Le théâtre mythologique est mêlé  d’un antique secret le présent, qui, tel un dieu, le rend immortel. Nous sommes clairement identifiés comme éphémères, ces êtres humains qui irritent tant Zeus. Les dieux sont des acteurs puisque les dieux sont dans la salle et nous sur le plateau du théâtre. Ils répètent les prophéties  futures d’un Prométhée enchaîné à la mise en scène de sa souffrance. La scène est inversée nous sommes sur le théâtre puisqu’on voit la rampe devant nous, il y a un côté cour et un côté jardin, une table de maquillage,  et la servante fétiche d’Olivier Py. Tout est inversé et nous devons penser à l’endroit. La mise en scène nous donne le rôle du regard silencieux. Nous répétons notre personnage, en toussotant, riant, dans l’extrême concentration. On voit la salle vide, les fauteuils et la table de répétitions. Sommes-nous de l’autre côte du miroir ? Non ! C’est une illusion de théâtre, car la scénographie nous donne à voir une proposition de théâtre dans le théâtre.

Trois étapes de l’histoire de Prométhée : la divination, le choix, la transgression

La divination. Prométhée doué de divination avait prévu l’issue favorable de la révolte contre Cronos, et logiquement préféra l’avènement victorieux de Zeus. Son pouvoir était grand. De tous les titans il était le plus talentueux. C’est lui qui enseigna l’architecture, l’astronomie, les mathématiques, la navigation, la médecine, la métallurgie et tous les autres arts utiles qu’il transmit à Athéna et aux mortels. Zeus exaspéré des capacités inventives de ces éphémères, que sont les hommes, décida de les exterminer, mais Prométhée intervint en leur faveur de façon décisive.

Le choix. Lors d’une dispute au sujet d’un taureau sacrifié, on demanda à Prométhée  d’arbitrer sur les morceaux consacrés aux dieux  et la part qui revenait aux hommes. Il fit deux sacs, l’un contenait la chair qu’il cacha sous l’estomac (partie peu ragoûtante de la bête), et l’autre rempli d’os et de graisse. Le roi des dieux, peu amateur de viscère, fut aisément trompé en choisissant le second. Zeus furieux d’avoir été dupe de Prométhée,  punit  le titan en retirant le feu aux hommes.

La transgression. Avec l’aide d’Athéna, Prométhée entra clandestinement dans l’Olympe. Il prit, sur un flambeau, un segment de braise du char de feu du Soleil et le glissa dans la tige évidée d’un fenouil géant. Il s’enfuit de l’Olympe et redonna le feu aux hommes. Zeus se vengea en enchaînant le titan à un rocher. Voilà comment naquit l’histoire du feu, et comment les mortels devinrent des hommes.

Olivier Py rend hommage à la poésie d’Eschyle (~525~457) en mettant en scène et en jouant le rôle-titre, mais on regrette qu’il ne va pas assez loin dans son projet. On aurait pu imaginé qu ‘il allait diriger au hasard un spectateur en lui ordonnant, d’un geste, de jeter la foudre ou bien de scander en écho quelques mots du Pouvoir et de la Force. Ou tout simplement de reprendre une scène avec une variante surprenante. N’est-ce pas l’illusion qui nous était offerte de pouvoir voir une répétition sans fin ? Dommage, car un théâtre National a les moyens de sa recherche et celle d’Olivier Py est chiche sur ce coup-là. Exception faite à l’actualisation, par les drapeaux, des révoltes Arabes, mais hélas pas assez définie. Avec Shakespeare (Roméo et Juliette) par exemple la prise de risque était assumée. La retouche du texte non plus ne nous apprend rien de nouveau et l’on peut dire que l’inachevé a un certain charme chez Eschyle, car ce qui est perdu est perdu. La direction des acteurs est parfois discutable quand les comédiens donnent dans une représentation vocale qui est censée être divine. Un jeu plus axé sur le sens de la pièce aurait mieux servit Olivier Py que cette diction en force. D’ailleurs Xavier Gallais, dans l’exagération criarde, a failli perdre son texte et se casser la voix. Heureusement, il se reprendra par la suite. La maîtrise du jeu revient à la lumineuse Céline Chéenne qui va de la souplesse à l’émotion comme un fleuve se jette à l’océan.

Prométhée enchaîné

D’Eschyle

Texte français, adaptation & mise en scène: Olivier Py

Décor & costumes: Pierre-André Weitz

Lumières: Bertrand Killy

Avec: Céline Chéenne, Olivier Py et Xavier Gallais

Du 14 – 19 février 2012

Odéon-Théâtre de l’Europe Ateliers Berthier

1, rue André Suarès – 14, Bd Berthier – Paris 17ème

Métro Porte de Clichy

1 rue André Suarès / 14 boulevard Berthier, Paris 17e

Métro Porte de Clichy – Réservations 01 44 85 40 19

www.theatre-odeon.fr

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